Consultez la déclaration du CHFO :
DECLARATION LIMINAIRE DES REPRESENTANTS CHFO
Madame la Présidente,
Mesdames, Messieurs,
Chers collègues,
Il est de tradition d’évoquer lors de la dernière CAP de l’année les faits marquants qui l’ont jalonnée tant pour les établissements que pour celles et ceux qui les dirigent avant que d’esquisser les perspectives pour l’année suivante.
Du mode “en attente d’arbitrage” à celui d’ “inconnu à cette adresse”!
Côté bilan, l’escarcelle est bien lourde pour nos collègues directeurs et plus d’un serait légitime à « vider son sac » ; côté perspectives, ce 5 décembre, les réponses à nos interrogations et revendications sont passées du mode« en attente d’arbitrage » au mode « inconnu à cette adresse » !
En revanche , ce qui est aujourd’hui bien connu est la situation exsangue des établissements dont nous avons la responsabilité qu’ils soient sanitaires ou médico-sociaux.
Un exercice 2024 de haute voltige pour les directeurs…
A telle enseigne qu’une lettre ouverte récente co-signée par l’ensemble des fédérations du public comme du privé, alerte sur la nécessaire révision de l’ONDAM 2024 .Les cosignataires y sollicitent une augmentation de l’ONDAM initial de 500 millions d’euros « afin de garantir aux établissements de santé un juste financement de l’augmentation de leurs coûts, augmentation liée à des facteurs exogènes sur lesquels ils n’ont aucun levier d’action ».
Avant même parution de ce courrier, les représentants du CHFO avaient déjà fait part de leur extrême inquiétude sur les conditions de clôture de l’exercice 2024, au moment où le 3ème avis du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie invitait à maintenir le gel prudentiel et à stopper les dotations complémentaires tardives aux établissements.
Ou comment monter une échelle les mains dans le dos alors qu’il manque des barreaux !
Pour positiver le bilan 2024, les équipes de direction, et les équipes hospitalières dans leur ensemble, peuvent être créditées d’avoir relevé le défi d’assurer tout au long de l’année la continuité des prises en charge : si peu d’éléments sont aujourd’hui rendus publics quant à la pression réelle qui continue à peser sur les capacités d’accueil de nos établissements, en raison notamment de la persistance de difficultés de recrutement, on sait d’ores et déjà que leur activité globale aura augmenté en 2024 !
Les hospitaliers ont ainsi illustré malgré eux l’adage du faire plus avec moins, et démontrer leur capacité à gravir une échelle avec les mains dans le dos , alors qu’il manquait clairement des barreaux…
En pareilles circonstances, les mesures minimales de sécurité doivent être de prises, à commencer par l’octroi de la protection fonctionnelle face aux risques encourus . Si grâce à la décision du Conseil Constitutionnel du 4 juillet 2024, la protection fonctionnelle devra être étendue aux collègues mis en cause, y compris dans le cadre d’une audition libre, il est indispensable de « remettre l’ouvrage sur le métier » pour que la responsabilité soit dans l’avenir appréciée au regard de la prise d’initiatives qu’elle suppose pour répondre aux objectifs définis dont chacun sait ici qu’ils peuvent être contradictoires !
Sur ce champ de la responsabilité, la récente contribution du Cercle de la Réforme de l’Etat doit être entendue et ses 16 recommandations mises en « haut de la pile » pour les travaux que devra nécessairement conduire la DGAFP pour modifier non seulement l’article L 134-4 du Code général de la Fonction Publique , déclaré inconstitutionnel, mais aussi pour qu’il soit complété.
La multiplication des rendez-vous non honorés
Pour ce qui est des évolutions statutaires attendues par les directeurs de la Fonction Publique Hospitalière, l’année 2024 pourrait être également placée sous le signe du lapin : mais nulle taxe à l’horizon proposée à ce stade, pour les indemniser des rendez-vous non honorés ou maintes fois retardés !
Ce n’est pas faute d’avoir proposé à nos interlocuteurs de la DGOS de leur tenir l’échelle pour aller chercher « en haut de la pile » ce dossier déclaré par eux- même comme prioritaire…
Pis encore!
Même ce qui ne nécessite aucun arbitrage financier est laissé en suspens : ainsi en est-il de la réactualisation de la liste des emplois fonctionnels non revue depuis septembre 2023 pour les DH et les D3S et depuis bien plus longtemps encore pour les DS.
Il en est de même pour clarifier enfin l’interprétation de l’article 6 du décret sur les emplois supérieurs relatif à la recevabilité des candidatures de certains fonctionnaires de catégorie A, là où d’autres ne sont pas empêchés de candidater au titre de l’ouverture desdits emplois aux contractuels, y compris lorsque leur profession précédente consistait à exercer le métier- certes honorable- de gérant de pizzéria.
Alors, me direz-vous, cessez de vous lamenter, il en va de l’attractivité !
Pour 2025, commençons donc par souhaiter la bienvenue à nos 103 futurs collègues reçus au concours de directeur d’hôpital et avec eux, nous dirons rabbit, rabbit, rabbit, à l’aube de 2025, locution anglo-saxonne -à nouveau lapinesque, censée porter chance dans de nombreuses cultures et traditions.
Il faudra bien ça pour aborder cette nouvelle année.
Au plan budgétaire, avec ou sans LFSS 2025 avant le 1er janvier, l’exercice sera sans nul doute périlleux : la hausse inévitable des cotisations patronales de la CNRACL demeure une préoccupation majeure pour les budgets de nos établissements ; mais ce qui le sera encore davantage seront peut-être les arbitrages qu’auront à assumer les directeurs pour en diminuer l’impact sur chacun de leurs établissements ou les conséquences sur les projets en cours.
En témoigne déjà la récente déclaration de la Conférence Nationale des DG de CHU qui fait état de « la perspective d’une crise inédite », impactant fortement les délais de paiement aux fournisseurs et le tissu économique des territoires, possiblement couplés à « des ruptures de trésorerie dès 2025 dans plusieurs établissements ». Par ailleurs, de nombreuses opérations immobilières retenues au titre du Ségur investissement devront être “dans le meilleur des cas différées voire dans certains cas abandonnées “. Or, “dans un contexte de tension extrême sur les finances, les gains de productivité risquent fort de devenir la seule variable d’ajustement possible pour les directeurs d’établissement qui feront au mieux pour préserver les projets d’investissement, appuie la conférence, non sans rappeler combien “cette course à la performance a pourtant montré toutes ses limites par le passé”.
Une crise de la CNRACL trop longtemps ignorée
Pour le CHFO, cette crise prévisible, d’ailleurs déjà évoquée par un Rapport de la Cour des Comptes en 2016, place une fois de plus les directeurs hospitaliers dans une situation intenable, au paroxysme de ce que peuvent être des objectifs des plus contradictoires.
Bref, un dilemme de plus à assumer par les directeurs alors même que la CNRACL, à ce stade, n’est pas assurée par l’Etat de la mise en œuvre des autres pistes préconisées dans le Rapport conjoint de l’IGAS, l’IGF et l’IGA au titre desquelles figure notamment la reprise de la dette de la CNRACL par l’Etat.
Presqu’inique lorsqu’on sait que notre Caisse de retraite – au titre du ratio démographique- a compensé depuis 1974 d’autres régimes pour 80 milliards d’euros cumulés et continuera à le faire jusqu’en 2027 alors même qu’à la fin2023, son déficit était de 2,5 milliards.
Coïncidence des chiffres ou pas, le CHFO ne se privera pas de rappeler en la circonstance la question longtemps restée tabou des 80 milliards d’exonérations annuelles de cotisations sociales consenties sans contreparties mesurables à nombre d’employeurs…
Nous ne pourrions conclure notre propos en cette instance sans faire brièvement état de la récente publication du Rapport de la Cour des Comptes sur l’évaluation de la loi de 2019 de transformation de la fonction publique : en substance, une réforme qualifiée d’ « inaboutie » ayant certes réduit le nombre et le périmètre des instances et notamment des CAP mais sans avoir réellement permis la rénovation du dialogue social qui en était attendue.
Et peut-être que si de nombreux employeurs publics ont estimé judicieux de conserver des pratiques, antérieures informelles ou parfois même en maintenant des instances hors du cadre légal, il serait pertinent de s’interroger, même a posteriori sur les apports réels d’une réforme dont la finalité était avant tout guidée par le dogme de mettre à mal le paritarisme.
Réforme ou affaires courantes : il faut agir
Quant à la réforme qui devrait nous concerner plus spécifiquement, nous avons lu les propos récents tenus par la déléguée interministérielle à l’encadrement supérieur de l’Etat qui déclare : « il y a tout un narratif à reconstruire sur le sens de la réforme de la haute fonction publique » …
Chiche en effet et dès 2025 pour que les directeurs de la Fonction publique hospitalière puissent enfin et près de 5 ans après entrevoir quelques perspectives motivantes à s’inscrire dans cette réforme.
Mais pour l’heure, le compte n’y est toujours pas : un postulat statutaire de départ à contre-courant du regroupement des corps, l’absence d’harmonisation des grilles, un accès encore très hétérogène pour ne pas dire inégal des directeurs à la formation continue, un dispositif « parcours et carrière » balbutiant et pour lequel aucun accompagnement financier de notre Centre National de Gestion n’a été réellement consenti si l’on en juge par son impossibilité à mettre en œuvre en 2025 le recrutement des 1ers conseillers carrière. Quant aux 3ème et 4ème partie de carrière, le chemin reste encore bien escarpé pour permettre davantage de fluidité dans les perspectives de celles et ceux qui devraient pouvoir légitimement en bénéficier.
Quels que soient les prochains locataires de l’avenue Duquesne et de la rue de Grenelle , soyez assurés de la détermination du CHFO pour faire « bouger les lignes » !
Je vous remercie de votre attention