Cette réunion de l’instance collégiale revêt une importance particulière. Bien sûr parce que c’est la première du genre, mis aussi en raison du contexte de crise sanitaire amplifiée.
La difficulté actuelle de notre exercice quotidien doit être soulignée. Les attentes vis-à-vis des établissements de santé sont majorées par rapport au printemps alors que les ressources restent rares et que la fatigue des équipes accroit les tensions.
Cette difficulté vaut pour nous, représentants des directeurs au sein de l’instance, même si nous avons à cœur de faire au mieux dans l’intérêt des collègues et des établissements.
Cette difficulté vaut aussi pour les collègues qui s’engagent dans une démarche de mobilité à une période aussi critique et incertaine. Nous serons attentifs à ce que leurs chances soient préservées et les facilités octroyées pour mener à bien les démarches.
Nous l’avons déjà dit : la confiance dans le nouveau dispositif d’accès aux emplois devra se construire dans la durée, car la réforme s’est faite contre la volonté de l’ensemble de la profession.
Nous donnons acte au Centre national de Gestion d’avoir voulu préserver des acquis de l’expérience antérieure. C’est le sens de notre présence et de notre volonté de participer de plain-pied à l’ensemble de la discussion dans l’instance collégiale. Nous regrettons le choix de la formule de membre consultatif pour les représentants des directeurs, car nous souhaitions assumer notre responsabilité jusqu’à la décision.
Cette instance va donc travailler dans le nouveau cadre réglementaire, et en s’appuyant sur les Lignes directrices de gestion qui ont reçu l’avis favorable du Comité consultatif national. Dans cette discussion, nous avons effectivement plaidé pour une stabilité des règles qui avaient été éprouvées par le Comité de sélection. Nous ne récusons pas une évaluation, voire des évolutions à terme, mais nous pensons là encore que la priorité allait à un rétablissement de la confiance, alors que le doute s’est installé chez les collègues.
Nous savons qu’ils auront tous un regard très vigilant sur la pratique qui va s’instaurer. Notre éthique sera d’en rendre compte en toute transparence. Bien entendu, le rôle de l’instance collégiale dans l’élaboration de listes de candidats est complexe, mais nous sommes convaincus que le respect de l’équité dans l’accès aux emplois se fait dans l’intérêt des établissements.
Nous avons des inquiétudes sur le rôle à venir de l’instance collégiale, à plusieurs titres.
Tout d’abord, la décision récente du Ministère de reconduire à l’identique la répartition des emplois fonctionnels de DH n’a que les apparences de la stabilité. L’administration elle-même impulse des réorganisations à travers les directions communes et les fusions, et ce sont les directeurs qui les portent et les assument. Qui peut soutenir dans ce contexte que les postes à haute responsabilité devraient en être réduits ? C’est pourtant ce qui se passe déjà puisque l’arrêté fixe un nombre de 355 emplois fonctionnels qui ne seront plus pourvus, faute de directions remplissant les critères. Déjà depuis mars 2020, il n’y avait plus que 345 emplois. Nous connaissions la politique fiction, nous découvrons maintenant les arrêtés fiction.
Nous ne pouvons nous satisfaire d’un tel déni.
La contradiction est d’autant plus forte à la lecture de la proposition de loi n°3470 déposée à l’Assemblée Nationale, et intitulée « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ». Celle-ci, s’appuyant en la déformant sur une recommandation IGAS, instaure dans son article 7 le passage automatique en direction commune des établissements parties à un GHT dont la direction deviendra vacante.
Ainsi, si l’on s’en tient aux emplois fonctionnels de chefs d’établissement, l’arrêté du mois d’octobre fixe leur nombre actuel à 262 ; en le rapprochant du nombre de 135 GHT, les collègues auront vite pris la mesure de ce qui s’annonce avec la proposition de loi.
Il ne s’agit pas ici de mettre en cause le principe des directions communes, même si nous en connaissons la lourdeur et le caractère précaire.
Ce que nous dénonçons, c’est d’une part la volonté explicite de réduire le nombre de chefferies sans en tirer les conséquences ni la reconnaissance dans les nouvelles responsabilités.
Mais d’autre part la proposition législative constitue un certain dévoiement de la conception du métier. En effet elle instaure une gouvernance d’un nouveau genre, en quelque sorte une « gouvernance automatique » voire « robotisée ». C’est selon nous à l’inverse de ce qui a été déclaré à l’issue du SEGUR, sur la nécessaire écoute du terrain, sur la territorialisation des réponses. En procédant ainsi, on voudrait en fait décréter que toute notion de co-construction est superflue. Beaucoup de directions communes se sont déjà mises en place, elles ont demandé et demandent encore des efforts, de concertation, de conviction, de compromis. Mais pour autant, comment croire que de se passer du consentement des instances et des Conseils de Surveillance sera un gage de réussite, et un signal à envoyer aux élus que l’on invite par ailleurs à s’investir plus avant dans les sujets d’organisation sanitaire ?
Pour le CHFO, il s’agit de plaider pour une conception démocratique du service public hospitalier, et nous sommes convaincus que la représentation nationale peut l’entendre.
Dans le même temps vous l’aurez compris, nous plaidons pour éviter de mettre au chômage technique l’instance collégiale à peine créée.
Un certain nombre de points restent à préciser sur les modalités de fonctionnement de l’instance, ils vont devoir être abordés dès cette première séance.