Pour un Comité consultatif national programmé à la veille de la Journée internationale des droits des femmes, nous serions tentés de saluer la posture inclusive du CNG.
Avec un ordre du jour centré sur les questions de diversité sociale, d’inclusion des personnes vivant avec un handicap ou d’égalité professionnelle, nous sommes un peu fiers de faire un pied de nez aux délires antiwoke et masculinistes du chef états-unien, et de tous ses adeptes là-bas, et malheureusement ici.
Pour le CHFO, la question de l’inclusion est évidemment indissociable de l’idée de santé globale. De ce point de vue, d’importants efforts devront encore être déployés pour que les cadres hospitaliers quittent le statut de cordonniers mal chaussés.
Les dispositifs en place tels que les concours talents, les recrutements dérogatoires ou la sensibilisation aux biais de recrutement sont en général classés dans la catégorie des mesures compensatoires. Chacun sait qu’une action de fond pour réduire les freins à l’inclusion doit porter complémentairement sur les conditions d’accès, sur les conditions de formation et sur les conditions d’exercice.
Lever les freins lors de l’accès aux corps de direction
Sur les conditions d’accès à nos corps, le CHFO a demandé et continuera de revendiquer le changement du calendrier des entrées en formation et donc des concours. Nous l’avons déjà évoqué ici au mois de décembre. Le repositionnement des rentrées en septembre est clairement une mesure d’accessibilité sociale, qu’il s’agisse des lauréats du concours interne ou du concours externe.
Le CHFO demande également que des préparations ouvertes aux fonctionnaires des autres versants de la fonction publique soient ouvertes à l’EHESP, au-delà de l’actuel cycle préparatoire réservé aux hospitaliers.
Lever les freins lors de la formation
Sur les conditions de formation, la question du logement des élèves est également très sensible en termes d’accessibilité sociale et d’accessibilité tout court. L’absence d’avancées sur ce point maximise les tensions générées par la hausse du nombre d’élèves sur les récentes promotions. Il n’est pas normal que l’EHESP ne soit pas soutenue sur ce plan.
Sur les contenus de formation, les attentes sont nécessairement multiples, et parfois contradictoires. En tout état de cause, le CHFO privilégiera une approche pragmatique sur la question de la durée des formations. C’est le cas dans les autres Ecoles de service public, où les durées ont été plusieurs fois ajustées. Il n’est pas interdit de réinterroger l’équilibre entre la formation initiale d’une part, la formation post initiale dans le cadre de la prise de poste d’autre part, et la formation continue ensuite. Nous avons connu dans le passé d’autres formules que l’actuelle.
Les conditions d’exercice comme frein à l’inclusion et à la mixité.
La rudesse de nos conditions d’exercice n’est sans doute pas une évidence pour le grand public. Elle est d’ailleurs peu documentée, en termes de données, comme en termes de recherche, même si les contacts pris par notre organisation ou par d’autres montrent un intérêt de plusieurs équipes universitaires sur le sujet. Nous sommes convaincus de l’intérêt que trouverait le CNG à encourager des recherches sur nos conditions de travail, leur impact sur la santé comme sur le fonctionnement du service public.
En termes d’actions, le CHFO demande que la question du retour ou du maintien au travail des collègues après un accident de santé soit l’objet de mesures spécifiques. Nous sommes régulièrement saisis de difficultés rencontrées par des collègues, mais il s’agit sans doute de la partie émergée d’un iceberg. Le seul fait d’une absence longue a souvent pour conséquence que l’institution a tourné le dos au collègue, et que le retour est mal préparé. Si en plus s’ajoute quelques limitations fonctionnelles, le niveau de tolérance de la structure s’abaisse encore plus, s’agissant de cadres dirigeants qui ne doivent pas montrer de faiblesse, dans une conception viriliste ou sacrificielle du métier.
L’exposition implique la protection
A la rubrique rudesse de nos conditions d’exercice, figure très certainement au premier plan le niveau d’exposition de nombre de nos emplois. Pour le CHFO, il n’est pas question de dénoncer par principe cette exposition, elle est intrinsèquement liée à l’autonomie et à la responsabilité. Alors pourquoi ne constitue-t-elle pas un élément d’attractivité qui provoque la ruée de fonctionnaires d’autres corps ? Sans doute instinctivement perçoivent-ils ce que nous vivons cruellement, c’est-à-dire que cette exposition n’est pas assortie d’une protection à la hauteur.
La dispute actuelle provoquée par des refus de protection fonctionnelle en cas de mise en cause devant la Cour des comptes est symbolique. Les grands esprits auront beau jeu d’appeler au courage managérial des hauts fonctionnaires, si c’est pour aboutir au lâchage administratif combiné au lynchage médiatique, ils ne trouveront pas 5000 kamikazes pour diriger le service public hospitalier et médicosocial.
Heureusement, plusieurs acteurs plaident pour une évolution de la situation, non par empathie mais plutôt par pragmatisme : il faut continuer à trouver des volontaires ! Ce plaidoyer doit être amplifié, et nous attendons avec impatience une prise de position courageuse de notre administration et de notre ministère.
Mais le CHFO n’hésite plus à le dire aujourd’hui, si l’indifférence persiste, chaque collègue devra s’interroger : faut-il encore accepter de prendre un intérim pour être ensuite lâché par une ARS amnésique, qui non contente de vous refuser la protection fonctionnelle, ne lèvera pas le petit doigt pour vous aider mais pensera surtout à sa propre protection ? Le sujet n’est pas négligeable : selon les données issues des bilans PFR, ce sont chaque année environ 160 collègues qui assurent l’intérim d’une chefferie d’établissement.
Le sujet de la PFR et de l’évaluation est à l’ordre du jour de cette séance, avec la présentation des bilans de la campagne 2023 pour les trois corps. Nous y reviendrons donc, mais d’ores et déjà un point doit être souligné, c’est l’érosion continue du taux de retour des supports d’évaluation vers le CNG. En 10 ans, il a baissé de 10 points pour les DH, et de 15 points pour les D3S, alors qu’il est quasi stable pour les DS. Outre le fait que cela entame la représentativité des données présentées, c’est une alerte sur le respect de l’obligation annuelle de l’entretien professionnel. Et c’est sans compter sur le sort inconnu des plus de 350 contractuels recensés par le CNG dans son enquête de cartographie à l’été 2024.
Favoriser l’inclusion et l’égalité professionnelle nécessite un accompagnement des parcours.
Cette évidence est logiquement portée par le CNG. La disparité des moyens mis en œuvre pour ce faire avec ceux déployés au niveau de l’Etat, au niveau interministériel mais aussi dans chaque département ministériel, cette disparité est cruelle pour nous. Pourtant le récent rapport de France Stratégie sur « Le défi de l’attractivité » souligne l’impérieuse nécessité de son renforcement.
Au lieu de cela, nous entendons les couloirs ministériels bruisser des projets de réduction du nombre et des moyens des opérateurs de l’Etat élégamment habillés dans des contrats de « simplification » et d’efficience.
Le CHFO n’a jamais été partisan du mouvement « d’agenciarisation » de l’Etat. L’opposition entre l’Etat stratège et l’Etat gestionnaire est souvent une stratégie de fumiste, qui permet de se laver les mains des basses contingences de la mise en œuvre de sa politique et de se dispenser d’en rendre compte…Nous n’avons pas cette dispense dans nos établissements.
Quoi qu’il en soit, ce qui demeure pour nous, c’est le niveau de service rendu aux collègues.
D’ores et déjà le CNG subit un coup de rabot qui ne nous dit rien qui vaille, compte tenu de sa situation de départ. Mais s’il venait à certains l’idée de passer du rabot à la tronçonneuse, ce serait pour nous un casus belli, car la porte ouverte à la liquidation de la gestion nationale de nos corps professionnels.
Que cela soit bien clair aussi : notre défense de la gestion nationale des corps de direction et notre revendication de moyens adaptés à cette gestion ne seront jamais un motif d’abaissement de nos attentes vis-à-vis du CNG. Et que cela soit entendu.