Le retard pris pour l’installation d’un gouvernement se concrétise maintenant en méthode expéditive pour l’examen du PLFSS 2025. Ce sera pourtant un acte essentiel pour la survie de nos établissements sanitaires et médicosociaux.
Nous parlons bien de survie, tant la situation de départ est dégradée, même si elle est à peine évoquée par le gouvernement, pour édulcorer la gravité de l’enjeu.
L’examen en commission des affaires sociales est engagé, les députés doivent déposer leurs amendements d’ici demain jeudi !
C’est pourquoi le CHFO s’est adressé à chaque membre dès lundi 14 octobre, après première analyse du PLFSS.
L’analyse de l’ONDAM par le CHFO
Le point de départ est sans surprise, compte tenu du contexte : le gouvernement annonce un coup de frein sur les dépenses, et l’ONDAM n’est pas épargné.
On peut d’abord revenir sur 2024 : le PLFSS commence par afficher des objectifs révisés pour 2024 : il est pris acte de la dérive des dépenses de soins de ville avec une révision de l’ONDAM Ville d’1,1Mds€, mais rien n’est fait pour l’ONDAM Etablissements de santé, comme si tout allait bien. L’ONDAM Personnes âgées est même raboté de 200M€…
L’objectif d’évolution globale 2025 est donc fixé à 2,8%, en baisse par rapport à la programmation pluriannuelle antérieure. Ce coup de frein est amené à se poursuivre sur les exercices suivants avec un ONDAM annoncé en dessous de 3%.
Le gouvernement affirme compenser dans l’ONDAM la hausse de cotisation à la CNRACL, ce qui est parfaitement faux, puisqu’il l’inscrit dans une évolution de l’ONDAM révisée à la baisse.
Ainsi les hausses affichées de 3,1% pour les ES ou de 6% pour les EHPAD sont un leurre.
Le relèvement de cotisation CNRACL est évalué à 2,3Mds€ pour 2025; elle est à valoir essentiellement sur l’ONDAM établissements de santé et pour une part proportionnelle sur l’ONDAM établissements de personnes âgées et handicapées.
Ainsi, l’ONDAM ES sera plus proche des +1,5% au lieu de 3,1% affiché. Il n’y a donc pas de compensation, mais une réduction très sévère de l’évolution de l’ONDAM, qui ne peut pas couvrir à ce niveau la combinaison de l’inflation et de la hausse d’activité.
- En outre, le gouvernement annonce dans le même temps des mesures nouvelles sur les soins palliatifs, sur les soins critiques, sur la psychiatrie, sur les SMUR, sans les valoriser clairement. Cela relève du coup de baguette magique.
- Le niveau de déficit des établissements de santé en 2023 était de l’ordre de 2Mds€ en 2023 et celui des EHPAD n’est même pas chiffré, les indications intermédiaires donnent le signal d’une aggravation en 2024. Les établissements ne pourront soutenir une nouvelle cure d’austérité en 2025.
Mme la Ministre s’est défendue de vouloir toucher aux effectifs de la fonction publique hospitalière, mais partout dans les territoires, les ARS sont conduites à demander aux établissements des plans de retour à l’équilibre pour éviter les ruptures de trésorerie. Personne ne peut croire que cela soit réalisable par de simples économies sur les achats. Voter un tel ONDAM équivaudrait en réalité à valider des suppressions de postes dans les établissements.
La situation de la CNRACL est effectivement dramatique, confrontée à un mur démographique, et à l’imprévoyance des gouvernements successifs qui l’ont empêchée de constituer des réserves en la ponctionnant au titre de la compensation et surcompensation démographique.
Le relèvement des cotisations est donc inéluctable, même s’il doit être intégré dans un ensemble global de mesures qui ne sont pas évoquées dans le PLFSS. (cf. rapport des 3 inspections sur la CNRACL).
Mais de fait, cette mesure de recette pour la branche vieillesse est simultanément une mesure de dépense pour la branche maladie !
En réalité, la solidarité technique des différents régimes de retraite qui s’est concrétisée par des décennies de compensation et surcompensation devrait aujourd’hui se traduire par une ressource mutualisée et non pesant exclusivement sur les employeurs hospitaliers et donc sur l’ONDAM.
C’est la raison pour laquelle le CHFO demande pour la clarté que l’ONDAM des établissements soit fixé à 4% avant relèvement de la cotisation CNRACL. Cela conduira mécaniquement à un déficit supplémentaire de la branche maladie, mais cela correspondra à la vérité des prix, car il ne serait pas possible de le cacher dans les déficits des hôpitaux.
Ensuite, il n’est pas possible non plus que le Parlement se contente d’un pilotage à courte vue : si, comme il est annoncé, l’ONDAM est maintenu en dessous de 3% pour 2026 et 2027, et si en même temps le relèvement de la cotisation CNRACL se répète sur ces 2 années, c’est l’asphyxie assurée.
Trois nécessités s’imposent donc à l’ordre du jour :
- Un plan de résorption des déficits des établissements qui les empêchent désormais d’investir. Les paramètres doivent être clairement affichés
- Un plan d’action globale pour le rétablissement de la CNRACL
- Et donc un vrai débat sur les ressources de la sécurité sociale et sur les exonérations multiples.