Corbeil-Essonnes le 6 janvier 2023 :
« En ce qui concerne la direction même de nos hôpitaux, et je remercie ici vraiment tout le travail qui a été fait et le travail remarquable qui a été fait à la fois par le directeur d’équipe administrative et l’équipe médicale. Je pense qu’on a tous vécu pendant le Covid une chose qui a levé les barrières et c’est pour ça que je disais : Moi, je ne crois pas du tout à l’opposition. Très longtemps, on a dit : Ça ne doit pas être les soignants qui dirigent l’hôpital, ça doit être les administratifs. Après, on a dit les problèmes, c’est les administratifs qui les dirigent. Cela fonctionne quand c’est ensemble. Moi, je souhaite, et on a plusieurs textes de loi portés par nos parlementaires qui permettront d’aller dans ce sens, que le ministre mène une concertation qui nous permettra de préciser les modalités organisationnelles mais qu’on puisse mettre à la tête de nos hôpitaux un tandem administratif et médical. Un vrai tandem qui, sur la base d’un projet qui est soumis, en redonnant toute une place aussi au conseil d’administration de notre hôpital, puisse bâtir un projet, que le meilleur projet soit choisi, et que ce soit un tandem qui soit mis en place. Je pense que c’est une bonne chose pour que tout le monde travaille bien ensemble, main dans la main. »
Où en est-on ?
La Commission des affaires sociales du Sénat a auditionné le 6 juillet 2023 le ministre de la Santé pour faire le point sur l’état d’avancement de cette réforme, à propos de laquelle la Commission des Affaires Sociales s’était déjà plusieurs fois interrogée sur l’opportunité, alors que la loi du 26 avril 2021 n’avait toujours pas ses textes d’application.
La mission confiée au Professeur Claris et à Mme Baille, constitue, selon le ministre, le rapport II, qui vient en quelque sorte, faire le bilan du rapport précédent. L’objectif est d’entrer dans une « logique de réponse aux besoins de santé de la population » mais le ministre est conscient que le « vivier nécessaire » des médecins n’est pas suffisant, ce qui impose une « logique progressive ». Et effectivement, Le ministre souligne lors de son audition qu’il s’agit toujours d’une « priorité » , mais qu’il faut compter avec le temps et annonce « un délai de 5 ans ». Monsieur Braun a insisté sur le recours à des médecins expérimentés, qui devront être formés, toujours dans une logique de territoire.
Il annonce ainsi la mise en place d’un « contrat de gouvernance », avant la fin de l’année entre le président de la CME et le directeur répartissant les responsabilités. Ce contrat sera soumis au conseil de surveillance tous les ans pour évaluation.
Quid novi sub sole ?
En effet, rappelons nous de la circulaire N° DGOS/CABINET/2021/182 du 6 août 2021 relative à la mise en œuvre du pilier 3 du Ségur de la santé, des recommandations et bonnes pratiques sur la gouvernance et la simplification hospitalière à la suite de la mission menée par le Pr Olivier CLARIS annonçait que : « Le binôme directeur – président de la CME est la clef de voûte de la gouvernance hospitalière. Cette responsabilité managériale qui lui incombe, l’oblige à créer les conditions d’une collaboration fluide et efficace au service de l’institution. Chacun des deux acteurs, en ayant accepté sa part de responsabilités, s’engage implicitement à respecter cette collaboration, et particulièrement le cadre de fonctionnement défini avec la charte de gouvernance. »
Comme nous en avons maintenant l’habitude, les pouvoirs publics sans résoudre quoi que ce soit au sujet de la gouvernance, viennent complexifier nos fonctionnements et obscurcir nos perspectives :
- L’évaluation par le Conseil de Surveillance, si elle est négative, aboutira à quoi ? La remise en cause du Directeur ou du Président de CME ? Qui partira ? Qui restera ?
- Que deviendront les chartes de gouvernance du rapport Claris I ?
- Où est la valeur ajoutée du rapport Claris II ? Surement lexical, puisque l’on est passé d’une « charte de gouvernance » à un « contrat de gouvernance. »
- Etc.
Ensuite, quel formidable aveu d’impuissance lorsque Mme Baille souligne lors de son audition que « l’on recense 800 centres hospitaliers et 1 200 si l’on intègre les centres de proximité. Or il n’y a pas 1 200 praticiens ou médecins mobilisables sur des fonctions de direction ».
L’écart entre ce qui a été annoncé par le Président de la République et le résultat esquissé est tellement important que l’on peut dire que le narratif présidentiel n’est ni programmatique ni performatif, mais relève simplement de l’illusion rhétorique.