Le monde disparate qu’est le champ des formations paramédicales a connu de profondes mutations. En amont même de la crise actuelle des ressources humaines, on soulignera la transformation des référentiels de formation, l’universitarisation, la multiplicité des acteurs et pouvoirs (Régions, ARS, DREETS, GHT, Universités).
Régions et territoires
Les Conseils régionaux sont devenus les financeurs des formations paramédicales mais sont également en charge des autorisations des instituts et des agréments de leurs directeurs. Cela fait qu’aux logiques financières, pédagogiques et démographiques, s’ajoutent des logiques de cohérence voire de compétition entre territoires.
Transformations pédagogiques
La réingénierie des études paramédicales modifie profondément les approches pédagogiques. A une logique de savoirs structurés par champs disciplinaires et centrée sur la dispensation des soins, se substitue une approche par compétences, ce qui impacte l’ensemble des organisations. C’est pourquoi, la formation sur les terrains de stage et l’enseignement à distance sont au cœur des débats.
Pour que ces derniers soient une véritable organisation apprenante, il faut renforcer la coopération entre directeurs des soins formation et directeur des soins gestion afin de travailler les conditions d’une alternance réussie.
De plus, si l’organisation juxtaposée des formations est encore prédominante, des initiatives de rapprochements de filières montrent l’intention de favoriser une culture commune, une complémentarité des interventions et une connaissance des rôles de chacun.
Les tendances organisationnelles des instituts
Ces dernières années, pour répondre à ces changements, des regroupements et des mutualisations entre écoles et instituts se développent. Dans la plupart des établissements de santé sont apparues des entités nouvelles : « Pôles formation », « Département des instituts », « Instituts régionaux de formation », …). Ces entités ne relèvent pas seulement d’une obligation réglementaire, mais elles répondent aussi à des logiques fonctionnelles de gestion administrative, économique et de ressources humaines.
La mutualisation
La tendance actuelle à des regroupements de structures et des mutualisations de moyens privilégie les organisations où un directeur des soins assure la coordination de plusieurs écoles et instituts. Ce dernier doit donc anticiper, initier et piloter le changement avec une nécessaire co-construction de la mutualisation. Elle ne se décrète pas mais se construit à petit pas avec les acteurs et les étudiants qui doivent s’approprier les changements.
Plus-value de la mutualisation
Elle doit consister en un positionnement plus fort des instituts dans l’établissement, le GHT, l’Université et le territoire, qui s’appuie sur un projet stratégique commun.
La mutualisation des ressources humaines permet de développer le partage d’expertises et de compétences pédagogiques afin de travailler en inter-filières pour apprendre à se connaître et engendrer une réelle approche interprofessionnelle
Mutualisation implique coordination
Très souvent dans les instituts, le directeur des soins est à la fois coordonnateur et directeur de plusieurs instituts. Ses missions et responsabilités se démultiplient ; il est à la fois opérationnel, pilote, politique et stratégique.
Au fil des années, on constate une réduction du nombre de directeurs des soins. En conséquence, les postes de directions d’instituts sont compensés par des cadres supérieurs. Cela oblige à une nouvelle complémentarité entre les directeurs des soins et les cadres supérieurs responsables pédagogiques : le CSS est opérationnel / stratégique, alors que le directeur des soins est stratégique / politique.
Former au « travailler ensemble »
Chaque filière restant sensible à la préservation de son identité, le rôle du coordonnateur est bien de créer une identité commune aux instituts tout en préservant les identités propres de chaque métier de la santé.
Le partage des enseignements et des travaux de groupe pluridisciplinaires doit se développer en s’appuyant sur des méthodes pédagogiques variées, afin de partager les expériences et d’échanger sur les interfaces entre les métiers.
En conclusion
La tendance à la mutualisation que nous venons de décrire relève souvent d’injonctions, parfois du choix des acteurs. Les clés de réussite d’une coordination des instituts passent par quatre lignes directrices :
- Impulser une authentique dynamique de travail collectif pour une mutualisation des compétences humaines et des ressources matérielles
- Harmoniser les outils pédagogiques et de gestion en inter instituts : logiciels de gestion des dossiers étudiants, partage de nouvelles méthodes pédagogiques (pédagogie inversée, démarche réflexive, situations emblématiques en simulation), politique de formation continue inter-instituts, certification multi sites …
- Positionner et renforcer la place des instituts dans son territoire, avec une nécessaire organisation et offre de formation en proximité des établissements de santé.
- Valoriser nos instituts sur le territoire par une politique de communication vigoureuse soutenue par les établissements.
La coopération directeur d’établissement/ DRH/ Coordination des soins/ Direction des instituts apparaît comme une des clefs de sa légitimité avec une répartition des rôles, des processus de décision clairs et transparents. La gouvernance des instituts de formation doit être coconstruite et partagée.
Le statut et la carrière du directeur d’institut, acteur incontournable dans le pilotage des appareils de formation, devront être préservés avec un déroulé de carrière à la hauteur des compétences et responsabilités.
Patrice PERRIER GUSTIN – Christine VERGNES