Fact-checking #2 : le PLFSS 2023

Le 26 septembre 2022, le gouvernement déposait à l'Assemblée nationale le PLFSS 2023, ainsi que la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027. Le CHFO vous propose un premier décryptage à chaud.

Fin aout, le CHFO vous proposait un premier fact-checking sur la trésorerie des hôpitaux. Cette fois, c’est le PLFSS qui appelle notre vigilance. L’ONDAM 2023 est annoncé à 3,7%, et la FHF dénonce son insuffisance. Le CHFO s’inquiète de la perspective pluriannuelle et de la compensation incertaine des effets prix.

La communication sur le PLFSS 2023 est particulièrement centrée sur des mesures organisationnelles groupées autour de 5 thèmes :

1 – Renforcer le virage préventif
2 – Améliorer l’accès à la santé
3 – Mieux financer les modes d’accueil du jeune enfant
4 – Construire la société du bien vieillir chez soi
5 – Lutter contre la fraude sociale

(Voir le dossier de presse du ministère )

Nous reviendrons en détail sur les déclinaisons envisagées pour ces objectifs importants.

Les mesures annoncées sont les premières applications des objectifs que le ministre entend soumettre à la concertation dans le cadre du Conseil national de la refondation Santé, lancé ce lundi 3 octobre.

N’oublions pas cependant qu’un PLFSS est avant tout une “loi de financement de notre sécurité sociale”.

Sur ce plan, il est annoncé page 37 du dossier de presse :

“Renforcer le soutien au système de santé, en particulier aux établissements
de santé et médico-sociaux dans un contexte d’inflation.”

Cette annonce est suivie d’un diagramme pluriannuel :

L’effet est saisissant, (surtout avec une échelle commençant à 200mds), et “la pente est forte” dirait M RAFFARIN. Ainsi, du fait de la crise, mais hors dépenses de crise, l’ONDAM aura fait un bond de 21% en 4 ans.

Démonstration est faite que notre pays peut réaliser cet effort sans écrouler son économie. Les chagrins diront que c’est financé par la dette. Mais la dette en question a été transférée à la CADES, et c’est nous qui la rembourserons avec une CRDS prolongée de 11 ans.

Donc un ONDAM à 3,7% serait une poursuite de l’effort sans précédent réalisé en 2021 et 2022.

Les bases d’une vraie refondation de notre système de santé sont-elles ainsi posées ?

Pour s’en assurer, il faut aller consulter les “conditions générales de ventes” c’est à dire l’annexe B page 151 du projet qui nous donne les paramètres retenus pour une projection pluriannuelle. Voici un tableau parlant :

Si l’année 2019 doit être considérée comme le point zéro, on relèvera que l’ONDAM à 2,7% s’appréciait en regard d’une inflation à 0,9%

En 2023, l’ONDAM à 3,7% affrontera une inflation à 4,3% ; en 2024, ce serait un ONDAM à 2,7% contre une inflation à 3%.

Cela signifie donc une situation beaucoup plus tendue qu’en 2019 : s’agit-il du retour des « COPERMO performance », de réductions d’effectifs, de fermetures de lits, de réductions de l’offre de soins, de reports d’investissements, d’allongement des délais de paiements ?

Pendant que l’hôpital public doit mettre en œuvre une multitude de réformes de financement :

  • les arbitrages ne sont pas toujours rendus en 2022,
  • l’intégration de l’enveloppe inflation n’est pas fixée, 
  • le Ségur est un « vrai casse-tête » comme le reconnait la représentante DGOS lors de la 4ème journée des finances hospitalières du CNEH,

Décidément, le bon cadrage macro-économique des dépenses de santé n’est pas au rendez-vous.

Allons plus loin en combinant le facteur prix et le facteur volume :

En 2019, l’ONDAM correspondait tout juste à la combinaison croissance PIB + inflation (1,8+0,9). Sur toute la période 2023-2026, le gouvernement prévoit que l’ONDAM soit inférieur à la combinaison Croissance et inflation.

L’hypothèse retenue, ou plutôt l’intention affichée, est donc celle d’une réduction de la part des dépenses de santé dans le PIB du Pays.

Nous soumettons donc au débat cette analyse qui méritera sans doute d’être complétée et précisée.

A première vue, cette trajectoire n’est ni réaliste, ni souhaitable.

En tous cas, ce n’est pas la refondation du système de santé que le CHFO entend défendre.

  • Nous cadres de direction, devrons veiller à des trajectoires de retour à l’équilibre malgré l’effet ciseau évident
  • Nous cadres de direction, devrons assurer la permanence des soins malgré la pénurie des personnels médicaux et soignants
  • Nous cadres de direction, devrons assumer les recompositions de l’offre de soins sur le territoire dans le cadre d’une planification régionale de moins en moins lisible
  • Nous cadres de direction, devrons éviter des vagues dans nos établissements grâce à un dialogue social innovant,
  • Nous cadres de direction, devrons accentuer le partage de la décision avec les autres catégories professionnelle tout en étant les seules à devoir assumer devant les juridictions pénales et financières.

Chers collègues, nous cadres de directions, devrons maîtriser le « en même temps ».

Heureusement, notre attachement au service public hospitalier, nos valeurs, notre professionnalisme et notre engagement sans compter les heures permettent de tenir à flot nos établissements, abimés par les années de rigueurs suivies de la crise épidémique.

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